D’abord un peu de sémantique : Evaluation ou Appréciation des performances ?….
Dans le but d’évacuer quelques confusions conceptuelles très courantes dans le contexte marocain : je préfère parler de système d’appréciation plutôt que d’évaluation qui elle a une connotation de jugement et qui bien souvent fait référence à des pratiques dépassées, quasi-scolaires de notation dans lesquelles la hiérarchie distribue les bonnes et les mauvaises notes à ses collaborateurs et se soucie peu de leurs attentes et des moyens de les accompagner pour améliorer leurs compétences et leurs performances.
L’appréciation dont nous parlons est un processus formalisé amenant le manager à apprécier les résultats atteints et les compétences acquises par chacun de ses collaborateurs au cours d’une période de temps déterminée, généralement sur une année.
Ce processus tend à déterminer les raisons des réalisations obtenues et les causes des contre-performances dans le but de définir en commun des axes futurs de consolidation ou d’amélioration afin que l’entreprise comme le collaborateur en tire le meilleur parti.
Au Maroc deux tendances marquent l’évolution des systèmes d’appréciation
Deux pratiques coexistent dans l’environnement professionnel marocain : un système qu’on peut désigner d’archaïque piloté de manière unilatérale par la hiérarchie, orienté exclusivement vers le passé, dans une approche de notation type « bilan annuel » du collaborateur, avec pour finalité la sanction, dont les règles sont implicites et les critères génériques et non mesurables.
En parallèle et à l’opposé se développe de plus en plus une pratique moderne de l’appréciation fondée sur des règles, des référentiels et des supports explicites préparées et diffusée largement en amont du processus : Job description, objectifs périodiques, critères de tenue de poste.. ..
Dans cette approche la finalité est l’amélioration des performances du collaborateur dans un cadre bilatéral d’engagements réciproques, orientés avenir et dans lequel l’appréciateur et l’apprécié construisent ensemble un plan de développement qui favorise l’épanouissement du collaborateur et qui l’aide à développer davantage ses compétences et à améliorer ses performances.
Les facteurs de succès d’un système d’appréciation
- Simplicité : le nombre de critères, de grilles et d’échelles d’appréciation doivent être réduitset simplifiés à l’extrême.
- Mesure : tout ce qui n’est pas mesurable ou tout au moins observable ne doit pas être retenu.
- Utilité: le système doit déboucher sur des sorties concrètes: formation, stages, mobilité, réorientation professionnelle,coaching…
- «Objectivité et équité »: les gens se comparent et ne peuvent admettre que dans la même entrepriseles appréciations diffèrent en fonction de la « rigueur » des appréciateurs.
- Un système Evolutif: « rafraichir » le système tous les 3 ans pour éviter qu’il ne se transforme en rituelsuperficiel ou en corvée administrative.
Les erreurs et les risques les plus courants lors de la mise en œuvre d’un système d’appréciation
- Verser dans la sur-appréciation et la sous-appréciation qui sontrespectivement révélatrices d’un manque de courage managérial de l’appréciateur ou bien à l’inverse d’une dérive autoritaire qui inhibe l’apprécié.
- Etablir unlien mécanique entre l’appréciation du collaborateur et sa situation salariale. Ces questions qui risquent de polluer la réflexion et la relation entre les protagonistes peuvent être traitées dans un autre cadre.
- Le manque de préparation en amont de l’appréciation. Du côté de l’appréciateur, celle-ci doit être documentée par des supports complétés à l’avance, au calme et avec le plus de recul possible. L’appréciédoit à son tour bénéficier d’une formation pour se familiariser avec les supports. Ensuite, il doit pouvoir établir son plan d’action pour défendre ses chances lors de l’entretien. Pendant le face-à-face, il doit être capable de commenter ses contributions tout en explicitant ses attentes en termes de formation, de mobilité, de conditions de travail…
- La subjectivité et le sentiment d’iniquité qui s’ils ne peuvent être totalement éliminés doivent au moins être réduits en étant factuel, en s’appuyant sur des données quantifiable ou du moins observable eten évaluant le travail et non pas l’homme.
- Transformer l’appréciationen procès. Il faut éviter d’évoquer des sujets personnels. Les jugements de valeur et les a priori sont également à bannir
- Enfin une belle évaluation sur le papier, mais qui ne débouche sur rien de concret en terme de plan de développement du collaborateursera contre-productive pour l’entreprise. Le système risque de perdre son attractivité et se transformer en rencontre routinière voire en corvée administrative. En plus de la performance et de l’efficacité du collaborateur dans son poste actuel, ce rendez-vous annuel doit être l’occasion d’aborder son avenir.Il doit préciser de façon claire et réaliste ses besoins en stages, en formation, en mobilité, en coaching et exprimer ses souhaits de participer à des projets…